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17 janvier 2012 2 17 /01 /janvier /2012 21:48

 

 CONSEILS OUVRIERS ALSACE 1918 BLOG1

                               Quand le drapeau rouge flottait sur la cathédrale  de Strasbourg

 

Des conseils de soldats et d’ouvriers en Alsace Lorraine de Colmar à Mulhouse, de Strasbourg à Haguenau, de Metz à Thionville !

                                                                          C'est quoi cette histoire ? 

Ne cherchez pas dans vos livres d’histoire puisque pour les autorités françaises, les conseils d’ouvriers et de soldats en Alsace-Lorraine  n’ont jamais existé. (Ou alors un tout petit peu)

 

 

L’épopée des marins revenus en Alsace pour y apporter la révolution, leur volonté d’organiser des conseils de soldats et d’ouvriers (appelés aussi « soviet ») à Colmar, Mulhouse, Haguenau, Strasbourg… Puis nous verrons comment l’opposition des alsaciens “socialistes“  français a su détourner cette vague révolutionnaire pour activer l’arrivée de l’armée française, délivrant ainsi l’Alsace du joug allemand qu’il soit impérialiste  et “encore moins“ bolchevique ……

                          Extrait  du dossier de presse  de : “Quand le drapeau rouge flottait sur la cathédrale“

 

 Le-Drapeau-rouge.jpg

 

En Allemagne le 30 octobre 1918 l’Etat-major du port de Kiel et de Wilhelmshafen ordonna, sans consulter le gouvernement, une ultime sortie de la flotte allemande. Mais les marins, refusant de mourir pour l’honneur, se mutinèrent. Le 31, furieux de s’être fait voler son ultime baroud d’honneur, l’état-major jusqu’au-boutiste, transfère 600 marins mutinés à Kiel, un des principaux ports de guerre, et met aux arrêts les meneurs. Beaucoup des 16 000 Alsaciens-Lorrains incorporés dans la Kriegsmarine avaient participé à la mutinerie de Kiel. Ils rentrent chez eux, emportant leurs espoirs révolutionnaires. En cette fin d’octobre 1918, de nombreux soldats, marins et ouvriers décidèrent d’élire des conseils ouvriers, similaires aux soviets russes, prenant le pouvoir dans de nombreuses villes du pays. Les marins se libèrent de la tutelle de leurs officiers et s'organisent dans des soviets appuyés par les ouvriers des chantiers navals. Ils réclament la paix immédiate, revendiquent la création des conseils ouvriers et paysans, et l'abolition de la dynastie et c’est ainsi que le drapeau rouge flotta bientôt sur tous les navires de la baltique

 Kiel-port-de-la-baltique-point-de-depart-de-la-revolte.jpg



La contagion révolutionnaire se répand rapidement ,le mouvement gagne les grandes villes du Nord : Lübeck, Hambourg, Brême. Cologne, Munich et Berlin Novembre 1918, un vent de liberté souffle sur l'ensemble de l'Allemagne : 3 novembre 1918, l’armée tire sur les 600 manifestants exigeant la libération de marins mutinés. Le lendemain, c’est l’insurrection. Pour les révolutionnaires, l’heure a sonné de la révolution sociale. Le 8 novembre, un conseil d'ouvriers, de paysans et de soldats établit la « République des conseils de Bavière ». Le même jour, la population de Strasbourg apprend la proclamation de cette République des conseils et la situation devient insurrectionnelle. En Alsace-Lorraine, l'état-major allemand est dépassé. Le lendemain à Berlin est créé un « comité d'action » composé, en partie, par des spartakistes et des délégués d'usine. La peur d'une révolution émancipatrice, faisant suite à la guerre, s'empare alors des classes bourgeoises, et la réaction des principaux chefs des partis sociaux-démocrates de France et d'Allemagne est la même : il faut rétablir l'ordre à tout prix. Le 9 novembre 1918, Guillaume II (empereur d'Allemagne, issu de la dynastie prussienne des Hohenzollern ; protégé par les nazis, il meurt en 1941) abdique, et le chancelier Max von Baden (chancelier du Reich) transmet ses pouvoirs au social-démocrate Friedrich Ebert (premier président de la République allemande de 1919 à 1925 ; déjà nationaliste en 1914 et favorable à l'Union sacrée, il participe à la répression et à la destruction du mouvement spartakiste en 1919).


Les marins de Kiel, pour beaucoup originaires du Land Elsass Lothringen, décident de réquisitionner deux trains pour rentrer chez eux. Il faut souligner le rôle actif joué par les Alsaciens-Lorrains dans la préparation et le développement du mouvement révolutionnaire à l'intérieur des différentes parties de l'Allemagne. Ils arrivent les 9 et 10 novembre à Strasbourg et font de la gare un des foyers de la liberté. (La date du 13 Novembre serait plus exacte comme le  précise JP)   Il fallait propager en Alsace l'incendie allumé sur les côtes de la mer du Nord et qui embrasait l'Allemagne entière.

 

 Train-soldats-aux-poings-vengeurs.jpg

 

Dans  la nuit, le train roulant à toute vapeur passa Osnabrück, Münster, Düsseldorf, Cologne sans s'arrêter, sa cheminée lançait des flammèches. C'était le mercredi 13 novembre. Et aujourd'hui jeudi, ils étaient arrivés à Strasbourg : 180 hommes seulement. Car ils en avaient déposé 40 en cours de route à Metz et à Sarrebruck. A 180 ils formèrent les rangs sur la grande place de la gare de Strasbourg, mirent les fusils à l'épaule, puis sans perdre une minute, drapeau rouge en tête, ils se dirigèrent par l'étroite rue Kuss vers le quai Saint-Jean, puis vers le quai Kléber, d'où ils gagnèrent rapidement le palais de justice ; ils allaient à toute allure car ils avaient déjà compris une chose : en matière de guerre ou de révolution, la rapidité est déterminante. Si tu n'es pas assez rapide, l'autre l'est, et si tu es plus rapide que l'autre, tu as déjà à moitié gagné. »

 

Les ouvriers se mettent en grève et se mobilisent pour soutenir le mouvement révolutionnaire. Celui-ci fait tache d'huile et s'étend à toutes les casernes et cantonnements d'Alsace jusque sur le front. Sur le front des Vosges,  on fraternise et on manifeste avec le drapeau rouge. A Saverne, les soldats se mutinent, pendant qu'en Lorraine les nombreux immigrés italiens présents se joignent au mouvement. Les militaires (l'essentiel de la population active de la classe ouvrière est sous l'uniforme) et les ouvrières qui arborent le drapeau rouge organisent des conseils à Haguenau, Colmar, Mulhouse, Sélestat, Saverne, Guebwiller, Metz, Schiltigheim, Bischwiller, Molsheim, Erstein, Neuf-Brisach, Thionville, Sarreguemines, etc. L'administration municipale s'effondre, et nulle part le mouvement révolutionnaire ne rencontre de résistance dans la population.

 

 Strasbourg-soviet-proclamation-1918.jpg

Des conseils prennent en charge les usines pendant que les mines sont occupées, comme à Knutange. A Algrange, Hagondange, Rombas, des grèves sauvages éclatent. Les conséquences de l'arrivée des insurgés sont immédiates : l'ancien Etat s'écroule et emporte avec lui le gouvernement Schwander Hauss (du nom du maire de Strasbourg et du secrétaire d'Etat allemand) ; mais, suivant la situation dans les villes et les villages, il n'y a pas systématiquement de transformation importante des pouvoirs institutionnels en place. Pour tenter de faire contrepoids aux révoltés, les parlementaires transforment le Landtag en conseil national d'Alsace-Lorraine, ou Nationalrat. En réalité, le Nationalrat, parlement censé être la représentation nationale alsacienne, n'a aucune force, et seuls subsistent des organes de pouvoir à l'échelle locale. Dans le même temps, les sociaux-démocrates alsaciens favorisent la création de conseils ouvriers, et y participent dans toute l'Alsace-Lorraine pour pouvoir noyauter et contrôler le mouvement révolutionnaire afin de faire balancier aux conseils de soldats, beaucoup plus à la recherche d'une rupture sociale. Ces sociaux-démocrates sont « nationalistes chauvins », attachés à l'héritage jacobin de la Révolution française, hostiles à l'internationalisme, à l'autonomie de l'Alsace-Lorraine et à l'émancipation du prolétariat. (Lire « La social-démocratie alsacienne soutient puis écrase les soviets en nov. 1918 » et « Le mythe de la gauche : Un siècle d'illusions social-démocrates ».

 

Les soviets de Strasbourg et leur noyautage par les sociaux-démocrates.

Les soviets fleurissent dans Strasbourg, et le soir du 10 novembre il y a deux véritables pouvoirs dans la ville : le comité exécutif et l'ancien conseil municipal (avec Peirotes, Frey et Antoni). Il est composé de 13 membres élus par les différents conseils d'ouvriers et de soldats, siégeant au tribunal sous la présidence modératrice de Rebholz (secrétaire du Syndicat des ouvriers brasseurs) ; parmi eux, Jacques Peirotes. A côté de ce conseil d'opérette siège  le puissant soviet du tribunal (composé des soldats insurgés qui poussent à la révolution).

 10.-Nov.-1918---La-foule-rassemblee-Place-Kleber-attend-l.jpg

 


Ainsi, l'autorité passe entre les mains des différents conseils, dont les objectifs principaux sont : la destruction de l'ancien système, l'extension internationale du mouvement révolutionnaire et la création d'un monde meilleur et plus heureux. Ils exigent du gouverneur Rohden la liberté de presse et d'expression, la levée de la censure sur le courrier, le droit de manifester. Les prisons ouvrent leurs portes et les conseils se rendent maîtres des bâtiments publics. Toutes les marques d'autorité sont supprimées et la ville se hérisse de drapeaux rouges. Une trentaine de commissions organisent la vie quotidienne (transport, finances, ravitaillement, démobilisation, justice...). Des grèves radicales éclatent, comme celle des cheminots. On peut lire sur les affiches qui couvrent les murs de Strasbourg : « Nous n'avons rien de commun avec les Etats capitalistes ; notre mot d'ordre est : Ni Allemands, ni Français, ni neutres. Le drapeau rouge a triomphé. »

 

 Une-Seance-du-Soviet-de-Strasbourg-au-tribunal--le-15-nove.jpg

 

Pour limiter cette poussée des insurgés et briser le souffle émancipateur du soulèvement social, les sociaux- démocrates et les municipalités jouent la carte du maintien de l'ordre dans la rue. L'augmentation des gardes civiques mises en place pour éviter les « pillages » va être une excuse pour limiter le pouvoir des conseils.

En réalité, les pillages et les réquisitions forcés des conseils sont une question de nécessité pour la population, qui doit survivre à l'effondrement de l'approvisionnement des villes, en ces temps difficiles, après quatre années de guerre, de rationnement et de réquisitions par l'armée allemande. Les tensions entre la bourgeoisie germanophile et la bourgeoisie francophile s'exacerbent, mais le consensus se fait autour de la destruction des conseils. Ainsi, la bourgeoisie allemande de Strasbourg ne cessera de faire appel aux troupes françaises, et un slogan courra dans les quartiers bourgeois : « Plutôt Français que rouges ». L'inquiétude va s'étendre aux chefs religieux, qui craignent pour leurs Eglises. Mais ceux-ci sont divisés sur l'attitude à adopter vis-à-vis de la France. Une partie est attachée à l'ordre « à tout prix », tandis que l'autre, issue d'une fraction de la bourgeoisie alsacienne, soutient l'idée de l'indépendance alsacienne comme tampon entre la France et l'Allemagne : le camp neutraliste.

 Proclamation-de-la-Republique-a-Strasbourg-2-copie-1.jpg

Ce contexte chaotique permet de mieux saisir la difficulté des soviets à mettre la révolution en pratique. Le 10 novembre, le président du conseil des ouvriers, Rebholz, proclame – sous la pression – devant le corps de garde de l'Aubette la « République socialiste ». A la suite de cette déclaration, Peirotes (chef du Parti socialiste et directeur de la Freie Presse socialiste qui devient l'organe officiel des soviets, assurant ainsi le pouvoir des sociaux-démocrates sur l'information) fait de même sous la statue du général de la Révolution française Kléber. Mais il se garde de définir la forme de sa république. Peirotes va dès lors devenir l'un des fossoyeurs principaux de la révolution de 1918 et de l'autonomie alsacienne. Il cumule les fonctions de membre du comité exécutif des conseils de soldats et d'ouvriers, de maire de Strasbourg et de ministre sans portefeuille de l'exécutif provisoire. Comme Richard à Colmar, comme Martin et Wicky à Mulhouse, l'exemple des conseils est pour lui une horrible perspective de liberté. Le social-démocrate Jacques Peirotes maire de Strasbourg écrit secrètement au grand quartier général (GQG) français et demande aux généraux de « hâter leur arrivée à Strasbourg, la domination des rouges menaçant de prendre une fin tragique », bien que les conseils ne souhaitent pas contester la légitimité du pouvoir municipal. On ne touchera donc pas à la propriété privée. Le 17 novembre, les troupes françaises arrivent à Mulhouse, mettant fin aux conseils, sans combats. En effet, le 15 novembre, une foule de marins révolutionnaires libérés des villes d'Allemagne du Nord vient renforcer le soviet du tribunal afin de défendre la nouvelle république. Pour Peirotes, il faut éviter par tous les moyens – même les plus crapuleux – une remise en cause de l'ordre social. C'est d'ailleurs lui qui prend l'initiative de constituer un comité exécutif à Strasbourg pour contrôler les conseils. Les sociaux-démocrates nationalistes ont pour principal souci de canaliser le mouvement en attendant l'arrivée des troupes françaises pour éviter la création d'une entité politique neutre ou révolutionnaire, autonome ou internationaliste.

 -L-entree-des-troupes-a-Strasbourg--1918.jpg

Le 22 novembre, le général Gouraud entre dans Strasbourg. L’acclamation de la foule suffira : il n’y aura jamais de référendum sur l’autodétermination. Le drapeau tricolore remplace le drapeau rouge qui flottait sur la cathédrale. L’armée française se précipite tout de suite au palais de Justice où se tenaient les réunions des conseils. Les agitateurs sont expulsés et les organisations ouvrières placées sous contrôle. Tous les décrets sociaux sont annulés : pour les autorités françaises, les conseils d’ouvriers et de soldats n’ont jamais existé.

 

Quant au Nationalrat, sorte de Conseil national créé par les sociaux-démocrates et la bourgeoisie Alsacienne (limité à Alsace-Lorraine devenue indépendante), il tombe sous la coupe des partisans du retour pur et simple à la France, les adversaires de l'autonomie. Le 22 novembre, l'armée française entre en force dans Strasbourg, la révolution est définitivement écrasée, les conseils sont dissous et la répression de l'armée française est féroce : déportations et exécutions sommaires. Le palais de justice est occupé pendant que la troupe s'empare des usines. Tous les « agitateurs » sont expulsés (220 000 personnes sont humiliées et chassées avec des bagages limités à 40 kilos, notamment en Algérie) et tous les décrets sociaux sont annulés.

 

 Tank-francais-a-Strasbourg.jpg

             La mise au pas de l'Alsace-Lorraine et la pommade du syndicalisme réformiste


Les Alsaciens vont ainsi passer d'un régime de dictature militaire allemand – qui s'était assoupli à cause des nombreux mouvements sociaux alsaciens et de la situation militaire de l'Allemagne – à un régime de dictature militaire français. L'Alsace est mise « en coupe réglée » par la France jusqu'en 1924. Ainsi, la République française ne reconnaît pas le Nationalrat et abroge la Constitution du Land Elsass-Lothringen (arrachée par les autonomistes à l'Empire allemand en 1911). L'Alsace-Lorraine se voit administrée directe- ment par Paris. L'idée étant de prendre de court les mouvements neutralistes et autonomistes qui retrouvent de la vigueur. Il faut imposer la centralisation et la départementalisation ! D'ailleurs, la France escamote le plébiscite de 1918 réclamé par les Américains, les Anglais et les Allemands sur la question de l'Alsace-Lorraine. De fait, le gouvernement français ne reconnaît qu'une autorité : la sienne, celle du vainqueur militaire. Pour mieux soumettre la population, les Alsaciens-Lorrains sont répartis par les autorités françaises en quatre « races », avec quatre modèles de carte d'identité « raciale » (environ 120 000 personnes sont expulsées). Les conséquences sont multiples : création de « commissions de triage », internement, expulsions de population, épuration ethnique, expulsion ou internement des opposants politiques, droit du sang, et cela alors que la France républicaine se veut la promotrice, à travers ses colonies, du droit du sol. Les autorités se comportent avec l’Alsace-Lorraine comme avec une colonie : privilèges financiers et postes à responsabilités pour les Français de l'« intérieur », salaires moindres pour les ouvriers alsaciens, impôts plus lourds, incorporation militaire, apprentissage brutal de la langue française, de la culture et du système scolaire et universitaire. C'est dans un environnement de « malaise alsacien-lorrain » et de destruction de la révolution de 1918 que le syndicalisme renaît en 1919. Le 23 février 1919, les anciens sociaux-démocrates – très appréciés par les autorités françaises à cause du rôle qu'ils ont joué dans la destruction des soviets alsaciens – proclament leur rattachement à la SFIO. C'est le premier groupe politique alsacien à s'intégrer à un parti politique français et à revendiquer l'assimilation immédiate à la France (le parti s'organise sur une base départementale, découpage typiquement français). Il vient plomber les mouvements sociaux et neutraliser la culture de lutte née pendant les journées du « novembre rouge ». Comme avant 1918 et dès janvier 1919, la Fédération du Bas-Rhin de la SFIO, présidée par Jacques Peirotes, s'appuie sur les syndicats socialistes ralliés à la CGT, liant syndicat et parti politique, tout en étant proche des positions de l'UGB (voir l’encadré). La CGT alsacienne préfère la négociation à la lutte et aux grèves. Ce qui, dans l'histoire du syndicalisme, est une triste nouveauté : le syndicalisme réformiste et l'idée d'un syndicat seulement réformiste. Pour l'anecdote, quand Jean Kaspar deviendra secrétaire général de la CFDT en 1988, Edmond Maire se félicitera de voir un Alsacien à la tête d'un grand syndicat « attaché aux réformes », et comme étant « l'aboutissement d'une boucle historique débutée il y a soixante-dix ans ». 1918-1988 = soixante-dix ans, CQFD !


De son côté, la CFTC (créée en 1919) combat la lutte des classes et cherche par tous les moyens à diviser le prolétariat en jouant sur la fibre religieuse des travailleurs alsaciens-lorrains. Les dirigeants de la CFTC, guidés par la « providence divine », jouent la carte du paternalisme et de l'assimilation. La période de 1919 à 1920 – malgré la répression, le chloroforme des sociaux-démocrates et des syndicats réformistes – voit l'explosion des luttes sociales (165 grèves en deux ans) et la réapparition des grèves insurrectionnelles inspirées des exemples russe et allemand. Ainsi, la grève générale du 20 avril 1920 qui éclate à Hagondange, en Moselle, prend dès le début un caractère politique : la domination arbitraire, la grossière exploitation et le refus de l'autonomie par la France y sont dénoncés. Le 21 avril 1920, 98 % de la population ouvrière de l'Alsace-Lorraine suit le mot d'ordre de grève générale, et un véritable mouvement populaire insurrectionnel se crée. L'industrie, le commerce, les moyens de transport sont paralysés. Le mouvement entre en ébullition et a la possibilité de se répandre dans les régions voisines. La « révolution » est de nouveau « aux portes de la France ».


Cependant, une délégation (composée de sociaux-démocrates et de représentants syndicaux de la CGT) envoyée à Paris ordonne aux comités de grève de procéder à la reprise du travail, faisant ainsi échouer lamentablement le mouvement. Ces pitoyables négociations n'aboutissent pas, car le gouvernement de Millerand ne s'engage à rien. Charles Hueber, un des principaux meneurs du mouvement, dégoûté par les actions crapuleuses des socialistes, crée à la fin de décembre 1920, avec Ernest Haas et Michel Heysch, le Parti communiste d'Alsace-Lorraine. Ce parti est très lié à la Confédération générale du travail unitaire (la CGTU est puissante dans l'industrie du bâtiment, les ateliers des chemins de fer et les services d'entretien municipaux) et défend l'autonomie. Ses membres vont subir, avec ceux de la CGTU, la violence patronale associée à la répression féroce du régime militaire et policier français : expulsions, listes noires, emprisonnements arbitraires et bataillons disciplinaires. Cette répression méthodique va affaiblir durablement les mouvements ouvriers en Alsace-Lorraine.

 

 

Sites et livres consultés et à consulter :

http://alsace.alternativelibertaire.org

http://oclibertaire.free.fr

Alfred Döblin, Novembre 1918. Une révolution allemande Tome I  “Bourgeois et soldats“

Remerciements :

Courant alternatif, hors série N°2, 3ème trimestre 1999

Courant Alternatif, anarchiste-communiste.

Vincent x,  Théo Rival (AL Vendôme), Renaud (AL Alsace)

Documentaire DVD de 53 minutes écrit et réalisé par Jean-Noël Delamarre, disponible : “Aux productions de la Lanterne“.

 

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